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Panier Vide

La toile botanique n° 80

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Plantes fantastiques dans un monde virtuel

Une petite balade sur la toile pour élargir ce thème des plantes fantastiques et continuer à découvrir la diversité des créations végétales issues de l’imagination humaine.


En science, on constate souvent que plus un groupe d’êtres vivants est éloigné de l’Homme, en terme d’évolution, moins il est étudié. Il y a infiniment plus d’études sur les primates que sur les vers oligochètes. De même sur les végétaux, mises à part quelques plantes alimentaires, on sait relativement bien peu de chose. Curieusement, on retrouve cette logique dans le monde des fantasmes, et comme le souligne [1] : « Nombre de récits fantastiques se sont intéressés au thème de la métamorphose ou de l’être hybride. Mais presque toujours ces thèmes liaient l’homme à l’animal. Pourtant, depuis l’aube des temps, une certaine fascination de l’homme pour la nature végétale hante ses rêves et quelquefois ses pires cauchemars… ». On trouvera à cette adresse un texte intéressant sur les plantes dans la littérature fantastique, une bonne introduction à une balade sur le web, sur la piste de ce fantastique végétal qu’explore le présent numéro de La Garance voyageuse.
Les premiers mythes sont riches à cet égard et foisonnent de nymphes transformées en plantes [2], de plantes de jouvence [3] et de forêts sacrées [4]. Dans les folklores, aussi, s’épanouissent des plantes étranges, comme ces deux hêtres parleurs d’une légende bretonne reprise dans un conte fantastique paru en 1904 [5]. Puisque vous pointez ce site, en passant découvrez-y aussi un conte de Charles Nodier où l’arbre Upas (issu d’un folklore plus exotique, voir l’article de G. Lemoine) joue un rôle important.
La littérature plus moderne fait beaucoup moins de place aux plantes. Shakespeare met bien la forêt de Birnam en marche dans Macbeth [6], mais, ni Hoffmann ni Guy de Maupassant, ne parlent de plantes. L’auteur anglaise Daisy Meadows, dans le premier des sept tomes du cycle rose bonbon de L’Arc-en-ciel magique, met bien en scène une Garance, mais il s’agit là du nom d’une fée [7]. Maurice Dekobra, en 1925, publie un chapitre bien suggestif : « et, avant que je puisse m’en rendre compte, elle m’entraîna devant la plaque de verre dépoli, m’enlaça brusquement de ses deux bras souples, se serra contre mon corps et mit sur ma bouche la fleur vivante de ses lèvres. Malgré moi, j’évoquai le baiser symbolique d’une plante de la jungle, d’une plante fantastique dont les lianes m’eussent enroulé et dont la fleur merveilleuse eût inspiré ma vie. » Mais sa lianescente Madone des sleepings [8] est bien humaine.
La vulgarisation des connaissances sur les plantes carnivores va relancer les fantasmes végétaux, et reste une puissante source d’inspiration comme le montrent les quatre nouvelles de Claire, Jean-Baptiste Loïc et Mehdi, collégiens à Saint-Aulaye [9]. Dans le cinéma, aussi, foisonnent « plantes carnivores, végétaux agressifs ou remarquables, sournois, immobiles et stoïques en apparence, rapides et frappeurs en nombreuses occasions, guettant leur proie, tapis dans l’ombre ou protégés et masqués au sein de plantes classiques » [10, ce site illustre d’ailleurs quelques belles affiches sur le thème]. Mais le cinéma fait aussi renaître des forêts fantastiques, la Forêt de l’Araignée d’Akira Kurosawa [11] ne rappelle-t-elle pas celle de Dodone [12] ? Vous retrouverez ces atmosphères brumeuses dans un documentaire sur le Mont Jiuhuashan [13]. Les habitants des pentes de cette montagne chinoise affirment que « de la montagne fantastique naissent des plantes fantastiques », aux propriétés médicinales supérieures !
L’apprenti sorcier Harry Potter suit des cours de botanique fort sérieux et l’une des plantes majeures est le Mimbulus minbletonia [14]. Pour le nom de genre J.K. Rowling s’est manifestement inspirée du Mimulus (la fleur de singe des anglophones), [15] et probablement de l’Asclepiadacée Trichocaulon pour l’aspect [16]. Mais n’oublions pas l’humour et le cactus de Gaston Lagaffe [17]. Il faut dire que les cactus ont parfois des formes bien étranges [18], bien propres à justifier le glissement sémantique qui nous fait qualifier une plante « incroyable mais bien réelle » de « fantastique ». Le site anglophone [19] est excellent pour découvrir des exemples de ces plantes incroyables, et on y apprend plein de choses. Le photographe Karl Blossfeldt excellait à découvrir le fantastique dans le monde végétal (faites donc une recherche d’images en entrant « Blossfeldt »). Son travail a récemment été revisité par William Ngan, étudiant en art à Londres pour engendrer des « fractals blossfledt », à voir absolument en [20].
Pour finir avec quelques images de plantes vraiment fantastiques, je vous propose de pointer [21] ou [22] (sur le second, j’aime bien la n° 9), ou encore de visionner la vidéo décoiffante de [23]. Fascinantes aussi ces plantes épineuses inventées pour pouvoir vivre dans le désert [24] : la nature imitera-t-elle un jour l’art, comme l’assurait Oscar Wilde ?

Texte : Marc PHILIPPE
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