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Nos actions - Dossier bois tropicaux

Bâtir sans détruire



Dans La Garance n° 51, nous vous invitions à participer à la campagne « Bâtir sans détruire » destinée à sensibiliser les utilisateurs publics de bois tropicaux aux conséquences de leurs achats…
Les forêts tropicales humides, qui ne représentent que 7 % des écosystèmes des terres émergées, font l'objet d'une exploitation intensive et irraisonnée pour alimenter les marchés des pays développés.
La France, malheureusement, ne fait pas figure de modèle. Elle est, en effet, l'un des plus gros consommateurs européens de bois tropicaux. L'utilisation de ces bois correspond aussi bien aux marchés privés que publics. Les collectivités territoriales et locales ont un rôle important dans cette consommation, que ce soit à travers les aménagements des bâtiments publics ou administratifs, les aménagements paysagers, d'espaces verts ou routiers ou encore les ouvrages d'art.
Cette consommation est contraire aux engagements français en matière de développement durable : l'Assemblée nationale avait ratifié le 18 juin 1998 un accord international sur les bois tropicaux décidant que, d'ici l'an 2000, les importations de bois et produits dérivés de bois tropicaux proviendraient de sources gérées durablement.

En complément de la campagne de sensibilisation menée par les associations les Amis de la Terre et Robin des bois, La Garance voyageuse s’est adressée aux Départements, Régions et CAUE (Conseil d'architecture, d'urbanisme et d'environnement) de France métropolitaine pour leur poser les questions suivantes :
- utilisent-ils des bois tropicaux dans leurs constructions ou leurs aménagements ?
- si oui, imposent-ils, que ces bois soient certifiés comme provenant de forêts gérées de façon durable ?
- envisagent-ils, dans un avenir proche, d'interdire l'utilisation de ces bois ou d'imposer la certification dans leurs marchés publics.



Il leur était aussi demandé de nous communiquer les quantités de bois tropicaux qu'elles avaient utilisées au cours des cinq dernières années. Les bois tropicaux encore très utilisés dans les équipements coupe-feu. Après un courrier envoyé au début du quatrième trimestre 2000 et une relance le 15 mars 2001 à tous les organismes n'ayant pas répondu à notre courrier, La Garance n'a obtenu que 80 réponses pour 214 organismes sollicités soit un taux de réponse proche de 40 % !

Les réponses les plus nombreuses correspondent à celles des départements (Conseils généraux) avec 40 réponses. Celles-ci sont très diverses. La plupart des départements se disent pas ou peu consommateurs de bois exotiques. Ils affirment être sensibles aux enjeux de la protection des forêts tropicales. L'utilisation des bois exotiques apparaît ponctuelle dans certaines constructions (collèges) et notamment pour la fabrication d'équipement coupe-feu compte tenu de la meilleure résistance au feu de certains bois tropicaux par rapport aux bois européens (réponses des départements de Seine-et-Marne, Haut-Rhin, Haute-Garonne, Meurthe-et-Moselle, Val-de-Marne et Gironde).

Les départements de Haute-Garonne, Mayenne, Meuse, Loir-et-Cher ont abandonné l'usage de tout bois pour l'aluminium et le PVC, exception faite pour les monuments historiques et secteurs protégés (en Meuse et Loir-et-Cher) où le bois est imposé par les Bâtiments de France. La Seine-Maritime et le Lot utilisent, quant à eux, occasionnellement de l'azobé pour l'aménagement des berges des rivières ou des ouvrages de défense contre la mer compte tenu de la grande résistance de ce bois. Le département de la Marne, quant à lui, « n'impose pas l'utilisation des bois tropicaux » (sic), heureusement !



Une dizaine de départements en pointe, mais beaucoup d’autres trouvent prétexte pour ne pas contrôler l’usage des bois tropicaux.
Dix départements, en plus d'adhérer au principe du développement durable et de certification développent la démarche H.Q.E (haute qualité environnementale), font apparaître des clauses dans leurs cahiers de consultation des entreprises (CCTP) lors des appels d'offre. Il s'agit des départements du Tarn, Calvados, Vaucluse, Haute-Loire, Tarn-et-Garonne, Jura, Vienne, Lot, Meuse et Val-d'Oise. Les départements de Haute-Loire, Aube, Meurthe-et-Moselle et Landes souhaitent avoir, quant à eux, des exemples de clauses particulières ou de label…

La Gironde, le Loiret et les Landes attendent des prescriptions ou un renforcement de la réglementation nationale pour imposer des normes plus strictes.

Le département des Landes précise que toute clause, visant à refuser des bois exotiques ou imposer des certifications, excédent largement les possibilités offertes à l'acheteur public dans l'élimination des offres qu'il reçoit. Il ne doit, en effet, s'appuyer que sur les normes nationales ou communautaires en vigueur.

Les réponses parvenues des Conseils d’Architecture, d’Urbanisme et d’Environnement sont au nombre de 23. La majorité d'entre elles nous informent que les CAUE ne réalisent jamais de maîtrise d'œuvre (architecte), ni de maîtrise d'ouvrage (financeurs des équipements) et que leur action se situe très en amont des projets. Bien que sensibles au principe du développement durable, les CAUE estiment que leur rôle d'assistance aux particuliers et collectivités ne doit pas porter, du fait de leur déontologie et leur indépendance, sur la définition de matériaux qui reste du libre choix des concepteurs et maîtres d'ouvrage… Nombre d'entre eux préconisent toutefois des matériaux traditionnels et régionaux.
Certaines régions essaient de développer des filières bois régionales…



La Garance a reçu 11 réponses des régions (soit 50 % de réponses). Les Régions ayant répondu nous informent qu'elles se sont engagées dans une démarche de développement durable et qu'elles sont vigilantes quant à l'origine des bois utilisés dans leurs équipements, souvent H.Q.E. De nombreuses régions, fortement boisées, ont également pris des initiatives pour développer la filière bois régionale. La région Poitou-Charentes précise toutefois qu'elle fait confiance aux entreprises qui répondent à ses appels d'offres et que celles-ci ne peuvent méconnaître les dispositions légales en ce qui concerne la provenance des bois qu'elles utilisent. La région Provence-Alpes-Côte-d'Azur attire, quant à elle, notre attention sur l'absence de label actuellement existant et disponible...
Mais beaucoup d’autres pratiquent la langue de bois.

Terminons par la région Basse-Normandie : elle nous rappelle que notre courrier sous-entend que les collectivités sont maîtresses de leur commande (ce qui est vrai) ; mais elle refuse le principe selon lequel le consommateur (ou la collectivité) par son choix (ou le boycott) de certains produits pourrait influencer le mode d'exploitation des forêts. Elle considère, en effet, que notre courrier laisse supposer « que les autorités douanières de notre pays sont incapables de filtrer ou contrôler correctement les arrivées de bois
tropicaux »…
La région Basse-Normandie utilise des bois européens et tropicaux « conformément à la législation en vigueur » et fait confiance à l'efficacité de « l'État de Droit ». Elle attend donc que l'État intègre dans sa législation l'objet de la ratification du 18 juin 1998 pour l'appliquer… Ce qui nous rapproche de la teneur du courrier du département des Landes.

Quant à notre demande, qui référence à la Loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs, la Région Basse-Normandie considère que notre allusion est sans fondement et qu'elle n'était donc pas obligée de nous répondre… (merci quand même !).
Texte : Guillaume Lemoine




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